Milieu urbain
Évaluation de la qualité de l'air urbain par les lichens
Les lichens, organismes symbiotiques entre un champignon et une algue, sont sensibles à la pollution de l'air. Ils sont donc utilisés pour évaluer la qualité de l'air, en particulier en milieu urbain, afin de compléter les données issues de capteurs physico-chimiques.
Diversité des lichens urbains à l'échelle d'un territoire
Dans le cadre de son plan de transition 2021–2026, l’UCLouvain développe un suivi de la biodiversité de ses campus afin d’évaluer la qualité des milieux naturels. Les lichens, symbioses entre champignons et algues, ont été sélectionnés afin d’initier un suivi de la qualité de l’air. En effet, chaque espèce de lichen possède des exigences propres concernant les variables écologiques (humidité, température, etc.) et environnementales (pollution azotée, pollution soufrée, etc.), ce qui rend l’étude de ce groupe intéressante pour évaluer la qualité générale des environnements.

Les lichens des arbres ont été échantillonnés sur 20 sites à Louvain-la-Neuve à l’aide du protocole standard européen. Cet inventaire a révélé une diversité lichénique relativement importante (44 espèces) à Louvain-la-Neuve, compte tenu de la faible diversité paysagère de la zone d’étude. La prédominance des lichens nitrophiles sur l’ensemble de la zone d’étude illustre l’influence de la pollution azotée à l’échelle de la ville. De plus, il a été démontré que les grands axes routiers qui entourent la ville exercent une influence négative sur l’abondance des lichens.

L’interprétation des résultats est limitée par le fait qu’aucune étude similaire n’ait été menée en Belgique à ce jour. Dans le cadre d’un projet wallon, de nouveaux inventaires seront réalisés en 2023 dans les à Namur et à Charleroi, ce qui permettra une comparaison avec cette étude. De plus, des indicateurs de qualité de l’air actualisés seront développés via une méta-analyse des données de la littérature, ce qui permettra d’approfondir encore l’interprétation des données.

Validation du protocole participatif Lichens GO!
Le projet Lichens GO! est une initiative citoyenne visant à évaluer la qualité de l’air urbain par l’étude des communautés de lichens corticoles. Le protocole Lichens GO! est une version simplifiée de la norme européenne, habituellement employée par les lichénologues professionnels. Concrètement, seuls trois arbres sont échantillonnés et l’identification des lichens est basée sur une clef simplifiée comprenant 41 groupes d’espèces. Afin de pouvoir comparer les résultats obtenus via les deux protocoles, il est nécessaire : (1) d’évaluer l’impact de ces simplifications ; et (2) de quantifier la variabilité introduite dans les relevés par des citoyens non-experts.

Afin d’évaluer l’impact des simplifications du protocole, nous avons utilisé un jeu de données collecté par un lichénologue et l’avons dégradé selon différents scénarios d’échantillonnage (variation du nombre d’arbres échantillonnés et du nombre d’espèces de lichens dans la clef d’identification). Cette analyse a montré que la diminution du nombre d’arbres entraîne une sous-estimation importante de la diversité des lichens, en plus de diminuer la représentativité des données. Cependant, le fait d’échantillonner trois arbres semble être un bon compromis entre effort d’échantillonnage et représentativité. D’un autre côté, les simplifications liées à la clef d’identification entraînent surtout un biais en matière d’interprétation écologique. Par exemple, les espèces acidophiles, souvent difficiles à identifier pour des non-expert, sont regroupées dans la catégorie « autre lichen crustacé », ce qui provoque une sous-estimation de la proportion de ce groupe. Plusieurs solutions sont envisagées pour compenser ce problème, telle que l’attribution d’un score écologique à cette catégorie ou l’ajout des espèces acidophiles les plus caractéristiques à la clef d’identification.

Concernant le biais observateur, 24 volontaires ont appliqué le protocole Lichens GO! de façon indépendante sur un même site. Leur relevé a été comparé à celui d’un expert, servant de référence. Cette expérience a mis en évidence une hétérogénéité importante dans les résultats, tant au niveau de la diversité que de l’abondance des lichens. Cette variabilité au sein des résultats est liée au manque d’expérience des volontaires, entraînant une mauvaise identification des lichens juvéniles ou manquant certaines espèces discrètes. Afin de pallier ce problème, nous avons amélioré la structure et les illustrations de la clef d’identification Lichens GO!, ce qui devrait faciliter le travail de terrain et mener à une meilleure qualité des données.